Des féministes défilent pour “se réapproprier la nuit”

Des milliers de manifestantes féministes se sont réunies à l’Opéra Garnier de Paris dans la soirée de lundi. Organisée de nuit, le rassemblement avait pour but de permettre au plus grand nombre de s’y rendre. 

© Fanny Tual

“Pour celles qui ne peuvent se permettre de manifester à 14 h” : tel était le but de la marche de nuit, selon la manifestante féministe Arya Meroni. Organisée par l’association AG féministe de Paris-Banlieue, créer en septembre dernier, cette mobilisation “permet de se réapproprier la rue et de reprendre confiance.” Selon le collectif de solidarité féminine Du Pain et des Rose, 3 000 personnes se sont rejoints pour défiler en “non-mixité” choisie. “Ni mari ni Macron, ni patrie ni patron” scandent les manifestantes féministes et anticapitalistes, réunies ce lundi soir devant l’Opéra Garnier de Paris, en amont de la journée internationale des droits des femmes prévue mercredi 8 mars. 

Suite à l’appel de l’association AG féministe Paris-Banlieue, les participantes ont défilé à partir de 20h en direction de l’Hôtel de ville pour ouvrir le bal aux “grèves féministes”, dénoncer le projet de réforme des retraites et “faire vivre une alternative au système capitaliste, raciste et sexiste.”

Près de 3 000 manifestant(e)s ont répondu présent(e)s pour cette marche de nuit organisée par l’association AG féministe Paris-Banlieue. Photo : Fanny Tual

“La nuit inspire plus d’émotions”

Le cortège nocturne était ouvert aux femmes, aux personnes transgenres et aux hommes gays, autrement dit à “toutes les personnes qui subissent de près ou de loin des violences machistes et le patriarcat, y compris l’homophobie qui est une forme de patriarcat”, expliquent les manifestant(e)s. 

Pour Eva, étudiante et militante, ce n’était pas la première fois qu’elle manifestait de nuit. En 2020, elle faisait partie des manifestantes ayant subi des violences policières à Paris à l’issue d’une manifestation féministe. “Je me suis fait traîner de force dans le métro par les forces de l’ordre. Ici, je me sens bien. Au moins, il  n’y a pas de danger, plaisante la jeune femme. Et puis la nuit inspire plus d’émotions. C’est plus radical. C’est moins un monde de bisounours. Nous avons le sentiment que la rue nous appartient.” 

À l’inverse d’Eva, c’était la première manifestation nocturne d’Anna. L’étudiante, pour qui “la nuit est flippante”, s’est très vite sentie “rassurée d’être toutes ensembles”. Selon les forces de l’ordre, sécuriser une manifestation en dehors des heures de la journée ne change pas de l’exercice habituel. “C’est loin d’être rare à Paris. Mais, c’est clairement plus facile au niveau de la circulation.”. 

© Constance Georgé

Sandrine Rousseau avait besoin “de retrouver cette énergie”

Dans la foule nocturne, Sandrine Rousseau, députée de la 9e circonscription, était présente pour soutenir le mouvement pour “déstabiliser le patriarcat”.

“Cette manifestation est intéressante pour pouvoir se réapproprier la nuit“, souligne la députée écologiste. Cible de vives critiques, Sandrine Rousseau a tenu à participer à la manifestation pour retrouver un soutien de taille. “J’ai besoin de retrouver cette énergie militante et féministe, précise-t-elle. Ce n’est pas facile de porter la voix des femmes lorsque nous sommes dans l’hémicycle.”

Des représentantes du collectif des mères isolées ont également pris la parole pour porter la voix de la catégorie “silencieuse”. “Nous sommes 1,2 million en France à la tête de familles monoparentales avec plus de 2 millions d’enfants concernés. Nous subissons tous les jours le patriarcat”, dénoncent les féministes devant la foule. “Nous représentons 45% des foyers qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Nous sommes plus touchés par le chômage, la précarité mais aussi les CDD (contrat à durée déterminée) et les horaires inhabituels”, poursuit le collectif des mères isolées. 

La voix d’Adèle Haenel s’élève dans l’obscurité 

21 heures. Alors que la nuit s’épaissit, une quarantaine de participantes, dont la comédienne et militante Adèle Haenel, se sont assises sur les marches de l’Opéra. Après quelques secondes de silence, un chant iranien a retentit. Tête baissée et mains semblant d’être menottées, les manifestantes scandaient “Femmes, vie, liberté” en référence au mouvement de révolte des femmes Iraniennes. “Des jeunes filles subissent des attaques dans les écoles par le régime dictatorial de la république islamique d’Iran, s’indigne Adèle Haenel. Ce régime est facsiste et féminicide.”

Mercredi, des dizaines de milliers de manifestants sont attendus à Paris et dans environ 150 villes en France pour la journée internationale des droits des femmes, placée sous le signe de la lutte contre la réforme des retraites et les inégalités salariales. Le rassemblement parisien aura lieu à 13h devant le Palais de Justice de Paris à la porte de Clichy. 

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