Les femmes se sentent de moins en moins en sécurité dans les rues de Paris. Ce sentiment d’insécurité est renforcé dans les transports en commun ou dans des lieux mal éclairés.
Décliner une invitation à un événement nocturne, accélérer le pas par peur d’être suivie, prendre un Uber pour éviter de mauvaises rencontres, tenir ses clés fortement dans la main…. autant de techniques qui permettent aux femmes d’anticiper les éventuelles agressions. En 2021, 67 % des parisiennes se sont senties en insécurité dans les rues de la capitale, selon une étude de l’Institut Paris Région.
“C’est fatigant de devoir toujours faire attention”
Âgée de 22 ans, Lou Van Cauvenberghe, étudiante en journalisme, adopte de nouveaux comportements depuis son déménagement dans la capitale en septembre 2022. “Depuis que j’habite à Paris, je suis toujours à l’affût. Je fais en sorte de ne jamais être seule. Je dors chez des copines ou je prends le dernier métro. C’est fatiguant de devoir toujours faire attention. Je me protège beaucoup”, confie-t-elle.
Craignant pour sa sécurité, Lou utilise CityMapper. L’application de GPS propose une option forte utile qui permet de choisir l’itinéraire le plus “sûr” afin de rentrer chez soi sans risquer de se retrouver dans des situations dangereuses. “L’avantage, c’est qu’il y a souvent du monde dans le métro comme dans la ligne 4”, présente l’étudiante.
Comme Lou, Eva, jeune infirmière, prend des précautions lorsqu’elle rentre à son domicile. “Je me déplace à vélo. C’est un moyen de transport qui me permet de ne pas trop me faire embêter. Même si, cela m’est déjà arrivé de me faire suivre ou de me faire arrêter par des voitures à des feux de circulation, se rappelle la jeune femme. Paris est loin d’être la ville la plus safe pour les femmes.”
Une grande étude régionale
Tous les deux ans depuis 2001, l’institut Paris Région (IPR) lance sa grande enquête régionale “Victimation et sentiment d’insécurité en Île-de-France”, qui fournit des informations sur les caractéristiques de l’insécurité par catégorie de territoires.
En janvier 2023, l’Institut a sorti son rapport final qui renseigne les atteintes subies par les femmes parisiennes entre 2018 et 2021.
Selon l’IPR, le sentiment d’insécurité se traduit de deux façons. D’abord, la peur personnelle. Elle correspond à la peur vécue ou liée à la crainte d’être agressée ou volée. Elle dépend en partie du risque réel d’être victime, mais aussi d’autres paramètres, comme les caractéristiques individuelles et environnementales. Ensuite, ce sentiment se matérialise par la préoccupation sociale pour l’insécurité ou préoccupation “sécuritaire”, qui se réfère à l’opinion de la personne sur l’importance qu’elle accorde aux problèmes de délinquance dans la société.
80% des femmes déjà victimes de harcèlement sexuel
Selon une autre étude réalisée par l’Oréal Paris et confiée à Ipsos, en 2021, 80 % des femmes ont déjà été victimes de harcèlement sexuel dans les lieux publics. Parmi ces agressions, 2,2 % sont commises par des proches.
L’enquête indique également que 4,6 % des Franciliennes interrogées déclarent avoir trop peur pour sortir seule le soir, contre seulement 0,5 % d’hommes. Les craintes se cristallisent notamment au moment de rentrer chez soi avec 51 % des Franciliennes qui affirment avoir peur dans les transports en commun.
En 2017, 64 % des franciliennes ont déclaré ressentir un sentiment d’insécurité de nuit contre 67 % en 2021, soit une augmentation de 3 points.
L’insécurité liée à un mauvais éclairage ?
En septembre 2020, l’Institut Paris Région avait sorti une enquête sur les rames des transports bondées et les gares encore trop peu surveillées.
Le plan indique que le nord de Paris est nettement marqué par la présence de points rouges, qui matérialisent des personnes en exclusion sociale, alcoolisées ou droguées. Les points jaunes représentent la présence de recoins sombres ou mal éclairés dans la capitale. La ligne 13 par exemple, présente beaucoup de stations catégorisées comme mal éclairées et sombres.
Selon une autre étude réalisée par Sports Direct, une boutique en ligne anglaise spécialisée dans la vente d’articles de sport, 44 % des femmes auraient déclaré ne pas courir en hiver parce qu’elles ne se sentent pas en sécurité dans l’espace public. Hélène Heurtel, réalisatrice de l’enquête sur l’insécurité des femmes, est en train de recueillir les données de 2023.